"Cyril Duret Témoin de son temps"
MARIE-ÉMILIE FOURNEAUX dans Connaissance des arts, janvier 2023

Ce portraitiste à la palette historiciste multiplie les références, des peintres vénitiens à André Derain.

Il se définit comme peintre mondain, « un peu par provocation », avoue-t-il l’œil frisant. Pour cet admirateur de la littérature du xixe siècle, faire de ce genre déprécié une spécialité s’avère être une manière d’aborder en peinture le rapport au temps. Il s’agit de gagner la confiance de son modèle et de nourrir une conversation, élément-clé dans ce processus qui touche tout autant au relationnel qu’au mémoriel. Ce talent pour l’entregent, Cyril Duret l’a probablement acquis dans son enfance en observant son oncle, le chanteur C. Jérôme, qu’il a portraituré plus tard dans tous les styles possibles. À l’Ensad de Nancy, il adopte la palette saturée de sa professeure Nina Childress, une surenchère optique qu’il abandonnera rapidement. Ses séjours à Rome et à Venise lui donnent le sens de la lumière, qu’il recherchera à travers l’usage de pigments purs et anciens, à la façon de Tintoret ou de Véronèse. En 2016, son admiration pour les portraits d’André Derain le pousse à se tourner vers des modèles de chair. L’écrivain Thomas Clerc devient le premier d’une longue liste de per- sonnalités dépeintes et souvent admirées. Ce sont près de cent cinquante portraits réalisés, et autant d’attention portée aux décors, pour leur qualité architecturale et leur signifiant psy- chologique. Installé à Beaucaire, Cyril Duret prend à cœur sa vie d’atelier, cultivant ses pigments sur sa terrasse et s’attelant au chevalet huit heures par jour. Les figures du monde arlésien exposées chez Anne Clergue lui ont encore donné matière à des histoires riches. Elles lui inspirent l’envie de réitérer, sous une autre forme, l’expérience du portfolio de gravures ayant illustré en 2022 ses entretiens avec le compositeur Aribert Reimann. L’exemple du peintre mémorialiste Jacques-Émile Blanche en tête.